Je profite de l’édition numérique de l’Obs sur « ces barbares qui veulent débloquer la France » pour offir à ceux concernés par la transition numérique, mais aussi et surtout aux déçus, aux revenus de tout, qui ne savent plus trop quoi faire dans leur entreprise ou dans leur administration pour faire évoluer les choses, une idée cadeau sous la forme d’un trio d’ouvrages qui va éclairer l’incroyable perspective historique et philophique que nous offre ce moment (Michel Serres), les conséquences pour les entreprises et leur nécessaire transformation en « plateformes » (Nicolas Colin, Henri Verdier), et enfin les moyens concrets d’enclencher de tels changements dans les grandes organisations (Pierre Pezziardi).
Petite poucette, Michel Serres, éd Le Pommier
Qu’on le veuille ou non, nos sociétés se distinguent par la capacité des générations à capturer le génie de leurs aînés et à y ajouter le leur. Cette capitalisation induit une accélération qui nous mène dans une phase d’imprédictibilité totale. Petite poucette n’a pas connu de monde sans accès immédiat à l’information, à la culture, à ses communautés. Cette révolution numérique, comparable dans sa portée à la révolution de l’imprimerie où « tout homme est pape avec Bible à la main », renvoie énormement de pouvoirs et d’aptitudes aux individus, faisant voler en éclat l’ordre pyramidal millénaire et sa séparation penseur / faiseur, et dessinant de nouvelles appartenances au delà des modèles classiques d’entreprise, de famille, de corporation, de sexe ou d’âge.
L’âge de la multitude, Nicolas Colin & Henri Verdier, éd. Armand Colin
Ou l’art d’embrasser cette révolution pour les acteurs économiques et les pouvoirs publics : l’entreprise « plateforme » devenue communauté de réutilisateurs dans une symbiose de moyens et de partages. Comment susciter, capter et redistribuer la créativité de la multitude pour devenir un géant de l’économie numérique, qu’elle soit publique ou privée.
Mais quel gouvernement ou quelle grande entreprise saura s’en saisir ?
L’ordre sans le pouvoir, la débureaucratisation par la confiance, éd Fondapol
Le chaînon manquant, car le dire c’est bien, le faire c’est encore mieux. Or trop souvent les empires ne se transforment pas, ils s’effondrent. C’est triste et pourtant toute administration ou entreprise du CAC40 doit se sentir bien loin des codes des plateformes, de l’économie ouverte, de la confiance en la multitude, ayant déjà du mal à faire confiance à leurs propres employés !
Effectivement, rien ne sert d’essayer de transformer leurs produits, si elles ne transforment pas leur process. Les grands plans, les gros projets, les lois et les décrets n’y feront rien. Nous devons embrasser une autre culture, passer du diviser/commander/contrôler au autonomiser/engager/faire confiance et au passage accroître notre tolérance à la diversité.
Plutôt que de classiques plans conformistes et dispandieux, autorisons des paris disruptifs mais peu risqués en offrant à des faiseurs issus du système l’autonomie d’agir. L’état doit montrer la voie s’il souhaite y engager son économie. Rien ne l’empêche de troquer du contrôle contre de la transparence. Rien ne l’empêcherait par exemple de lancer, vers des foyers volontaires, simple.gouv.fr pour prélever l’impôt à la source et verser les prestations sociales au plus proches des revenus, capturés en flux numériques permanents … mes-aides.gouv.fr a été réalisé en 6 mois, pourquoi ne pas passer à la vitesse supérieure et offrir un choc de simplification dont la puissance symbolique pourrait engager le reste de l’économie ?
Bonnes lectures, et très joyeuses fêtes à tous !
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